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The Killer

Le jeudi 16 novembre 2023, par Laurent Sapir
C'est curieux, chez les tueurs, cette manie de faire des phrases... Deuxième incursion de David Fincher sur Netflix, "The Killer" s'avère hélas tout le contraire du "Samouraï" de Jean-Pierre Melville dont le film prétend s'inspirer.

Le changement de température est assez net. Pour sa 2eme incursion en territoire Netflix, David Fincher a nettement refroidi son attirail. Après l'odyssée désenchantée et poignante de Mank, place à la plus glaciale des randonnées, celle d'un tueur à gages ayant raté une cible et dont la petite amie, en guise de représailles, a été sérieusement amochée. De Paris à Chicago, en passant par la Floride, la Nouvelle-Orléans, ou encore New York, le prix de la vengeance va s'échelonner en miles.

Adapté d'une BD elle-même inspirée du Samouraï de Jean-Pierre Melville, le récit, de fait, n'a que peu à voir avec la chorégraphie urbaine tissée autour du tueur joué par Alain Delon. Il est vrai que le sort de ce dernier nous tenait en haleine alors qu'on se contrefiche royalement de ce qu'il advient au Robocop de The Killer auquel Michael Fassbender prête une intensité de jeu bien moins probante que dans Shame où son personnage était tout aussi introverti.

Pire encore, le samouraï de Melville savait se taire. On n'en dira pas autant de la voix intérieure du Killer de Fincher, laquelle ne cesse d'aligner tout au long du film mantras sentencieux et autres dictons à la con du genre: "le chemin de la vie est derrière toi ". Comme dirait l'autre, c'est curieux, chez les tueurs, cette manie de faire des phrases... Moins bavard, le propos aurait pu éventuellement nous captiver au regard de l'univers high-tech où le personnage évolue. Obsédé par sa fréquence cardiaque, déjouant toutes les barrières numériques (vidéo-surveillance, cartes d'accès...) qui se présentent à lui, cet être-machine crapahute sans peine dans un univers ubérisé à souhait où le meurtre, en fin de compte, n'est qu'une activité capitalistique parmi d'autres.

Sauf qu'aucun vertige ne vient ponctuer cette fois ci l'univers sémiologique dont Fincher est habituellement si friand. Tous ces signes et objets dont il a dans le passé mis en exergue la réversibilité se résorbent ici dans un aplat qui ne génère que l'ennui. Une bagarre rudement bien filmée nous arrache épisodiquement à notre léthargie, tout comme l'apparition de Tilda Swinton en tueuse fataliste. Il semblerait néamoins que son super conte pour adultes à propos d'un chasseur et d'un ours ne soit que la reprise d'une blague de Michel Boujenah dans une émission de Cyril Hanouna. Fermez le ban.

The Killer, David Fincher, actuellement sur Netflix.

 

 

 

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